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samedi 6 août 2022

The Appointment - Lindsey C. Vickers (1982)


 Un homme doit partir de son domicile, car il a un rendez-vous professionnel important, mais cela frustre sa fille qui espérait le voir à son concert de violoniste. Ce trajet ne sera pas sans embuches...

The Appointment est un véritable ovni du cinéma fantastique et anglais, du fait de sa rareté et celle de son réalisateur qui fit très peu parler de lui avant et plus du tout après. Après des débuts à la télévision au sein de la BBC, Lindsey C. Vickers officie en tant qu’assistant-réalisateur sur plusieurs productions Hammer des années 70 et auprès de John Frankenheimer sur Grand Prix (1960) notamment. Les seuls éléments préfigurant The Appointment sont à chercher dans son court-métrage The Lake (1978, et présent sur le BR de la BFI), brillant exercice de frayeur où la nature menaçante, terreur indicible et mystère opaque font déjà forte impression.

The Appointment s’ouvre sur une séquence absolument sidérante. Un très rationnel et neutre rapport de police nous est lu en voix-off tandis qu’à l’inverse l’irrationnel se déploie à l’écran pour nous donner une « explication » du fait divers irrésolu de la disparition d’une fillette dans une bourgade provinciale. Un chemin de traverse dans la verdure de la campagne anglaise, une adolescente intriguée/intimidée par une peur sourde, un mal flottant puis c’est la manifestation brutale et inattendue du surnaturel. Une ellipse nous amène trois ans plus tard dans ces mêmes lieux où nous allons suivre le différent familial opposant le père de famille Ian (Edward Woodward) à sa fille de quatorze ans Joanne (Samantha Weysom). Cette dernière s’émeut de l’absence de son père, pris par un rendez-vous professionnel (le fameux « appointment), qui ne pourra pas assister à son récital de violon le lendemain. 

Au fond rien de très grave si ce n’est que quelques instants auparavant on voit Ian appréhender longuement la réaction de sa fille, une crainte confirmée par le drame qu’en fera Joanne. Au fil des échanges avec son épouse Dianna (Jane Merow), on comprend à quel point les parents très attentifs à la sensibilité à fleur de peau de leur fille cherchent régulièrement à la ménager de la moindre contrariété. Une tension étrange naît au sein du paisible foyer par le désarroi profondément infantile mais également assez trouble de Joanne face à cette absence. L’ombre du complexe d’Electre plane sur cette relation père/fille, d’autant que l’on devine le profond agacement de la mère à ce sujet. Un évènement somme tout anodin prend ainsi une proportion inattendue et instaure une atmosphère pesante au sein du foyer. 

C’est dans ce contexte que le surnaturel va s’installer. Des évènements étranges instaurent une forme de fatalité prémonitoire dont on ne sait s’il elle vient d’une force maléfique supérieure où naît des contrariétés observées du foyer. Toujours est-il que Vickers instaure une atmosphère glaçante et onirique nous prévenant du pire pour la famille, dans un mélange d’onirisme indicible ou d’expression d’une psyché malade. On pense beaucoup aux atmosphères futures mais dans un cadre contemporain plus concret de La Compagnie des loups de Neil Jordan (1984) où un sentiment interdit, une frustration, vont s’amorcer dans le sommeil et l’inconscient pour plier l’environnement et la destinée par le montage, le filmage flottant. 

 Après cette fatalité entrevue dans les effluves du rêve, Vickers crée un suspense assez insoutenable en laissant se révéler tous les signes de sa concrétisation durant le trajet de Ian. Tous les éléments restés mystérieux prennent progressivement un tour tangible et glace le spectateur dans une attente stressante ou la bande-son inquiétante de Trevor Jones, les inserts entêtants et hypnotiques au montage. Et lorsque l’inéluctable finit par surgir, Vickers entrecroise cette approche flottante avec un réalisme saisissant pour dilater un incident routier qui vaut bien tous les spots de préventions. C’est cette touche paganistes anglo-saxonne et ce réalisme brut qui rend le film si inclassable et son issue truffée de symboles (les chiens) si marquante. C’est au spectateur de faire le lien pour une explication pas si opaque en définitive (il suffit de faire le lien entre la première victime, possible « rivale » et Joanne) mais terrifiante sur le côté destructeur d’un amour exclusif et déçu. 

Sorti en bluray anglais chez BFI et doté de sous-titres anglais

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