Fu-Hung-hsue et un
autre chevalier experts en arts martiaux Yen Nan-fei, doivent protéger des
plumes de paon magiques des menées criminelles d'un mystérieux seigneur de
clan, et protéger aussi une jeune fille. 5 êtres magiques (Poésie, Échecs,
Peinture, Luth, etc....) au service du mystérieux maître d'arts martiaux
Gongsun Yu, seront 5 occasions de combats pour les deux héros jusqu'à la
révélation finale.
Chu Yuan signait avec Le
Sabre Infernal le second wu xia pian (film de sabre chinois) adapté d’un
roman de Gu Long après La Guerre des Clans (1976). Ce premier essai avait rencontré un grand succès et relancé
le genre, Chu Yuan peu familier au wu xia pian trouvant un écrin idéal pour s’y
épanouir avec les intrigues à tiroir de Gu Long. Cet auteur considéré comme le
Alexandre Dumas hongkongais avait su donner une vision unique du genre avec ce
monde des arts martiaux peuplés de bretteurs aux qualités surpuissante
poursuivant la quête d’être le meilleur mais où Gu Long apportait toujours un
questionnement sur la vacuité de cet objectif. Le Sabre Infernal était un des romans les plus réussis de Gu Long
et Chu Yuan allait grâce au triomphe de La
Guerre des Clans (Le Parrain
revisité façon wu xia pian) devenir pour le meilleur l’adaptateur attitré de l’écrivain
au sein de la Shaw Brothers.
Le film s’ouvre sur le duel en les deux chevaliers, le
taciturne Fu-Hung-hsue (Ti Lung) le plus rieur Yen Nan-fei (Lo Lieh). Ils s’étaient
affrontés un an plus tôt et Fu-Hung-hsue était sorti vainqueur de ce premier
affrontement, cette nouvelle rencontre devant déterminer qui domine leur art. Le
combat va pourtant être interrompu par l’irruption de mystérieux tueurs
cherchant et nos deux adversaires vont devoir s’allier contre leurs
commanditaires. Il s’agit de Maître Yu, légende du monde du monde des arts
martiaux qui cherche à se débarrasser des deux seuls adversaires susceptible de
lui faire de l’ombre. Fu-Hung-hsue et Yen Nan-fei vont devoir le devancer et se
procurer les Plumes du Paon, une arme redoutable qui rend son possesseur
invincible.
Si Maître Yu s’en empare, les ténèbres seront amenées à régner sur
le monde des arts martiaux. Une longue quête semée d’embûches et d’ennemis
diaboliques commencent alors pour nos deux héros. La scène d’ouverture illustre
parfaitement l’atmosphère du film avec cette scène de fête nocturne étrange se
vidant soudain pour laisser place au duel dans un inquiétant décor désert.
La
narration sous forme d’enquête et de mystère à résoudre obéit à la tonalité serial qu’affectionne Chu Yuan avec des
rebondissements incessant nous faisant découvrir l’étendue du complot et de
nouvelle informations sur l’insaisissable et omniscient adversaire qu’est
Maître Yu. On y découvrira progressivement la personnalité de nos deux héros.
Yen Nan-fei est un personnage flamboyant typique du wu xia pian par son port
élégant et sa nature insouciante face au danger, interprété avec panache par Lo
Lieh. Fu-Hung-hsue est plus intéressant et surprenant.
Le personnage est calqué
sur le modèle de L’Homme sans nom interprété par Clint Eastwood et magnifié par
Sergio Leone. Par son allure et son caractère taciturne, il évoque en effet un
personnage de western spaghetti échappé dans un wu xia pian. Un simili poncho
dissimulé à la manière d’un revolver son sabre très particulier qu’il peut
faire tournoyer dans des chorégraphies dévastatrice. Ti Lung impose son
charisme ténébreux à cette figure de dur à cuir taciturne et invincible qui
apparaîtrait presque comme antipathique au départ.
Le cadre constamment nocturne, les mises en scènes
inquiétantes de d’ennemis aux facultés surhumaines font tout au long du film
baigner le récit aux lisières du fantastique. Les éclairages baroques de Huang
Chieh (Mario Bava n’est pas loin) sont idéalement mis en valeur par la mise en
scène de Chu Yuan, chaque recoin de pénombre ou de hors champ semblant
dissimuler un danger inconnu dans les flamboyant décors studios de la Shaw
Brothers.
Quand ce n’est pas par l’image, c’est l’intrigue en elle-même qui
nous surprend avec des alliés qui se font ennemi sans qu’on l’ait vu venir (Chu
Yuan poussant moins à l’extrême cet aspect que dans La Guerre des Clans) et les combats incessants (splendides
chorégraphies de Tang Chia) ne sont jamais futiles mais toujours un moteur d’avancée.
Le film serait déjà extrêmement ludique sous cette forme mais, à capturant l’esprit
de Gu Long, Chu Yuan donne une profondeur inattendue au film. Fu-Hung-hsue se
fait ainsi plus vulnérable au fil du récit, notamment en causant
involontairement la mort d’un homme dont il doit protéger la fille (Ching Li).
L’austérité, l’allure modeste et la réserve du personnage sont à l’image de son
existence vide où tout – amour, amitié, famille – a été sacrifié dans sa quête
de domination du Jiang Hu (terme symbolisant ce cadre en vase clos du monde des
arts martiaux). L’aventure va alors servir de révélateur et remise en question
pour lui, Ti Lung amenant avec subtilité la bascule de son personnage.
Le scénario va carrément s’avérer une métaphore des doutes
de son héros par son surprenant retournement final. Sans trop en dire, Maître
Yu va s’avérer un véritable symbole vivant de cette vaine quête de pouvoir et
en en venant à bout, Fu-Hung-hsue va pouvoir aspirer à autre chose. La dernière
partie est ainsi captivante par les réflexions soulevées et par le combat qui
se joue face à un adversaire indicible car contenu également dans tout ce qui a
pu constituer les convictions du héros. Du mystère, de l’étrange et un
cheminement intérieur fascinant, Chu Yuan offre là une œuvre majeure du wu xia
pian.
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side
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