François Perrin est
ailier droit dans l'équipe de football de la petite ville de Trincamp.
Seulement il a un sale caractère. Le président du club est également le patron
de l'usine où il travaille. Apres un coup de gueule, il est renvoyé du terrain
et perd son emploi à l'usine. Et pour corser le tout, il est accusé d'un viol
qu'il n'a pas commis. Mais l'équipe doit jouer en coupe de France et ne peut
absolument pas se passer de Perrin.
La reconnaissance critique s’était conjuguée à des entrées
plus que confidentielles pour Jean-Jacques Annaud avec son premier film, La Victoire en chantant (1976). Malgré
son échec en salle le film sera récompensé de l’Oscar du meilleur film étranger
et ouvrira la porte des studios américains à Jean-Jacques Annaud qui reçoit
alors de nombreuses propositions. Le réalisateur ne se sent cependant pas prêt à
franchir le pas et décide de réaliser son second film en France, à une échelle
modeste. L’idée de Coup de tête lui
vient quand il suivra le parcours du club alors régional de l'En Avant de
Guingamp en Coupe de France en 1973, décliné en Trincamp au sein du film. Il
souhaite signer une satire grinçante inspirée du mauvais esprit des comédies
italiennes. Coup de tête se situe un
peu à part dans la filmographie d’Annaud, son seul film au sujet et cadre
contemporain et sans doute le plus verbeux quand les classiques à venir
fonctionneront surtout par l’image, parfois muet (La Guerre du feu (1981), L’Ours
(1988)) ou en tout cas fort silencieux (Le
Nom de la Rose (1986) amputé des joutes verbales du livre d’Umberto Eco, L’Amant (1992) et son ivresse des sens).
L’apport de Francis Veber au scénario sera donc décisif, apportant son sens du
dialogue incisif et sa drôlerie. L’alliance avec Annaud est ainsi idéalement
complémentaire, l’humour plus lunaire et boulevardier de Veber s’ancrant dans
une vraie réalité par le perfectionnisme et le réalisme recherché par Annaud.
Les deux écumeront ainsi les stades pour s’imprégner de l’atmosphère des
vestiaires de football, Annaud engageant l’encore inconnu Guy Roux comme
conseiller technique et les joueurs d’Auxerre de l’époque contribuant aux scènes
de match.
François Perrin (Patrick Dewaere) est un modeste ouvrier
jouant dans l’équipe de football locale de Trincamp. Son univers s’écroule le
jour où il a le malheur de blesser Berthier (Patrick Floersheim), le joueur
vedette. Il va être mis à la fois au ban de l’équipe et de l’usine, les
intérêts sportifs et économiques se confondant en la personne de Sivardière
(Jean Bouise) patron du club et de la plus grosse entreprise de la région. Les
succès du club sont autant de moyens de détourner ses employés d’une quelconque
rébellion en bon opium du peuple. Perrin va ainsi lentement dégringoler les
échelons sociaux et surtout être méprisé et repoussé par la population. La
situation est poussée à l’absurde sordide lorsque la Berthier commet un viol
sur une jeune femme (France Dougnac) mais, les seizièmes de final de la Coupe
de France approchant les notables vont s’entendre pour faire accuser à tort
Perrin.
Le film constitue un sacré brûlot renvoyant tout le monde
dos à dos. La corruption des notables se servant du sport comme opium du peuple, ce
dernier symbole de beauferie crasse et retournant sa veste idolâtre pour la
star du jour et là aussi le vedettariat et l’adulation rendant les sportifs
imbus d’eux-mêmes et tous permis. L’ensemble pourrait être assez sordide mais
par la grâce de l’écriture mordante et de l’interprétation truculente, on s’amuse
de bout en bout de ce triste constat.
Le tableau des « affreux » est
à la fois odieux et tordant de franchouillardise stupide avec un Jean Bouise
grandiose en président cynique (qui sera récompensé d’un César), bien secondé
par un casting représentant l’autorité (Gérard Hernandez) et l’ensemble des notables corrompus avec un
Michel Aumont grandiose de veulerie à l’instar de Paul Le Person. Patrick
Dewaere éclaire l’ensemble de son énergie, d’une certaine forme d’innocence
ancrée dans le réel à travers d’hilarants dérapages qui le rendent attachant
(les visites avinées à Marie).
On ressent comme souvent cette profonde
vulnérabilité et pureté qui le différencie de ceux qui le persécute, le script
lui offrant des occasions de prendre sa revanche avec une brutalité qui lui est
étrangère et qu’il n’osera pas adopter. Il se placera au-dessus de la mêlée en
retournant le piège contre ses ennemis : retourner cette adulation contre
eux et se rendre intouchable. L’ironie de certaines scènes atteint des sommets
tel ce moment où la prison refusera le retour au bercail de Perrin pour ne pas
attiser la colère des supporters et bien sûr le dîner voyant Perrin dire ses
quatre vérités chargées de menaces à chacun.
L’humiliation est complète lors de
la séquence finale où la peur et la culpabilité rendent plus tremblant les
oppresseurs que la vengeance de Perrin qui pourra les toiser la tête haute.
Brillant, alerte (le football rarement bien servi au cinéma offre des séquences
fort convaincantes même si son illustration n’est pas le point central du film)
et hilarant. Le film remportera un succès modeste en salle (notamment dû à un
Dewaere en guerre contre la télévision et refusant d’y faire de la promotion)
mais atteindra le statut de film culte au fil des rediffusions télé et
constitue désormais un classique de la comédie française.
Sorti en dvd zone 2 et bluray chez Gaumont
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