Otello Celetti est un
père de famille italien un peu oisif, qui inspire volontiers la raillerie.
Presque malgré lui, il est admis comme agent municipal de police, et s'empresse
alors de parader dans son nouvel uniforme, causant au passage un certain désordre.
Après s'être fait rappeler à l'ordre, il décide de changer de méthode, et
devient extrêmement zélé, au point de dresser une contravention au maire de la
ville...
L’Agent est une
comédie italienne méconnue et au carrefour du genre à travers sa star Alberto
Sordi. L’acteur y retrouve son emploi d’italien médiocre et veule popularisé
dans les années 50 (Un héros de notre temps de Mario Monicelli (1950)) qu’il expose à un propos plus virulent et
politisé qui aura cours dans ses grands rôles à venir comme Le Commissaire e Luigi Comencini (1962)
et Une vie difficile de Dino Risi
(1961). L’Agent prépare en tout point
ces deux films dans son scénario et la caractérisation de Sordi qui est déjà un
policier tiraillé dans sa vertu face à l’injustice (Le Commissaire) et une girouette jamais dans le bon timing des
penchants politiques dominants (Une vie
difficile). Otello Celetti est ainsi un père de famille oisif vivant aux
crochets de son épouse et de son beau-frère, refusant de travailler et source
de moquerie pour son voisinage. La scène d’ouverture donne le ton avec notre
héros défilant dans les rues en veste de chambre, apostrophant et perturbant
les vrais travailleurs (y compris son jeune fils de 11 ans mécanicien), pas du
tout honteux de son statut de parasite avec tout le panache ridicule dont est
capable Alberto Sordi.
Suite un concours de circonstances Ottello obtient le job
rêvé pour lui, agent municipal motorisé. C’est l’occasion d’un grand numéro
comique d’Alberto Sordi dans la première partie du film qui fanfaronne et joue
de ce nouveau pouvoir auprès de ceux qui l’ont moqué tout en témoignant de son
irrésistible incompétence. Les efforts maladroits pour coller sa première
contredanse jouent à la fois du talent gestuel de Sordi (où arborer une posture
autoritaire, siffler pour stopper une voiture ou simplement vérifier les
papiers d’un automobiliste devient un chemin de croix) mais aussi de sa nature
de matamore pathétique tant dans une
chaotique démonstration d’autorité où elle crée un embouteillage que pour la
séduction balourde d’une conductrice en panne (la star Sylva Koscina dans son
propre rôle). Cette première partie appartient à Sordi et son scénariste
Rodolfo Sonego concevant comme toujours un écrin idéal à son talent.
Luigi Zampa reprend la main par la suite, lui qui dès ses
débuts néoréalistes sut introduire des éléments comiques et déjà traiter de
sujet sociaux axé sur la médiocrité ordinaire, la corruption et la compromission.
La rencontre avec Alberto Sordi était inévitable sur ces questions et les deux
hommes collaboreront deux avant L’Agent, sur L’Art de se débrouiller (1955) et Ladro
lui, ladra lei (1958). Le mauvais timing précédemment évoqué de Sordi joue
sur le drame en cours lorsque émoustillé il laissera la belle Sylva Koscina
échapper à l’amende malgré l’absence de papiers. Celle-ci ayant témoigné sa
reconnaissance en citant son nom dans une grande émission de variété, le maire
(Vittorio De Sica) le rappelle à l’ordre pour lui rappeler que la loi s’applique
à tous, et surtout en période d’élection. Dans son zèle kamikaze, Otello va
ainsi traquer le maire coupable d’excès de vitesse et mettre malgré lui à jour
la liaison adultère de ce dernier mais aussi ses malversations immobilières.
Sordi est plus en retrait pour laisser place au regard mordant de Luigi Zampa,
dénonçant autant la municipalité corrompue que les opposants élevant Otello en
instrument de leurs ambitions dans leurs diatribes et un procès improbable.
Sordi est une fois de plus grandiose, flatté dans son orgueil d’être et s’élevant
en chantre de la vertu et probité. Mais bien évidemment les tirades trop
théâtrales, les postures trop exagérée, montre bien que l’autosatisfaction
domine sur la vague conscience politique chez lui. Tout cela s’avérera bien
vacillant mais comme souvent Sordi amène une forme d’humanité touchante à sa
veulerie, le revirement final étant tout autant dû à la lâcheté qu’à une vraie
préoccupation de sa famille. La leçon a été bien comprise avec un final
hilarant où, une fois de plus notre héros en fait une fois de plus des tonnes
en désormais subalternes supérieurement dévoué.
Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa
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