Gladys Clover, mannequin sans emploi, dépense
ses dernières économies pour louer un panneau publicitaire à Columbus
Circle, où elle fait écrire son nom en lettres gigantesques. Elle se
heurte à Evan Adams III, roi du savon, qui convoite cet emplacement.
Gladys devient rapidement une célébrité grâce à cette publicité et est
courtisée par Adams.
George Cukor avec Une femme s'affiche
un vrai film précurseur sur la quête de célébrité. Non pas que ces
sujets ne soient pas en vogue durant les années 50 , mais à l'aune des
quinze minutes de célébrités chères à Andy Warhol et de l'avènement des
réseaux sociaux, ils trouvent aujourd'hui un force supplémentaire. Glady
Clover (Judy Holliday) et sa quête maladive de reconnaissance ferait
ainsi aujourd'hui de la téléréalité et/ou poursuivrai son but avec la
même folie que le Robert de Niro de La Valse des pantins
(1983). Le scénario de Garson Kanin évite ces détours trop sombres tout
en se montrant tout à fait cinglant.
L'atout est de faire reposer
l'empathie sur la prestation de Judy Holliday qui campe une fille du
peuple candide pensant surmonter sa condition (entre la médiocrité de sa
province d'origine et l'anonymat social de sa vie urbaine précaire) par
la célébrité. Tout comme elle avait su magnifiquement humaniser un rôle
caricatural d'idiote dans Comment l'esprit vient aux femmes de George Cukor (1950), Judy Holliday humanise l'héroïne qui ne sombrera jamais dans la monstruosité du protagoniste de Un homme dans la foule
de Elia Kazan (1957). Parallèlement l'amoureux joué avec une belle
sensibilité par Jack Lemmon (dans son premier rôle au cinéma) offre un
regard critique bienveillant et une voie de salut à cette célébrité
vaine.
La vraie critique de Cukor porte finalement sur le peuple
suiveur, sorte d'entité uniforme attiré par la lumière avec cette scène
où s'agglutinent tous autour de Glady en reconnaissant dans son nom
celui qui s'affiche dans toute la ville (ce côté groupe à pensée unique
annonce la scène d'hippodrome de My Fair Lady
(1964). L'autre critique même si plus classique portera sur les
vautours cherchant à s'approprier la quête de regard finalement assez
innocente de Gladys et, même si cet aspect est rebattu, Cukor y associe
une dimension féministe qui lui est propre avec cette femme
rabaissée/manipulée comme dans Hantise (1944) ou Comment l'esprit vient aux femmes (et en quête d'identité comme La Croisée des destins
(1955) ou Femmes (1939)).
Le réalisateur anticipe le narcissisme des réseaux sociaux en
une scène magistrale où Gladys fait en boucle le tour en voiture de la
place où elle peut regarder l'immense affiche qui porte son nom (et plus
tard le tour de la ville quand elle se démultiplieront) comme on
reviendrait aujourd'hui admirer ses photos sur instagram. La folie des
selfies s'annonce également dans l'émeute pour un autographe où les
demandeurs sont simplement attiré par la célébrité sans connaître son
nom ni ce qu'elle fait. Le renommée sans socle ou talent sur lequel
reposer suffit un temps à Gladys (là aussi la vedette de téléréalité
n'est pas loin) mais Cukor n'ose pas une vision trop désabusée et
cynique ans un final bienveillant. Une belle réussite semble-t-il assez
méconnue du réalisateur.
Sorti en dvd zone 2 français chez Sony
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
bonsoir. Vu sur le cable en décembre.Une trés bonne surprise et une excellente comédie. Judy Holliday est épatante, et pas si cruche, et féministe comme vous le soulignez. On s'amuse vraiment et cette réflexion sur la célébrité est une peinture très fine sur l'Amérique, le pays où tout le monde a sa chance et peut réussir à partir de rien et où on est connu parce qu'on est.. connu sans qu'on sache pourquoi (livre L'image de Daniel Boorstin).
RépondreSupprimer