Janine ne connaît pas
son père. Sa mère l'a abandonnée. Elle vit chez son oncle et sa tante qui lui
manifestent peu d'amour. Elle rêve de luxe et d'amour et, n'ayant pas les
moyens de se payer cette vie, se met à voler de l'argent et des objets luxueux,
au point que sa tante et son oncle ne la supportent plus. Un jour, elle quitte
l'école et trouve un emploi de bonne chez les Longuet, une famille bourgeoise.
Pressée de devenir une femme, elle noue une liaison avec un homme marié plus
âgé qu'elle…
La Petite voleuse
reconstitue l’équipe gagnante de L’Effrontée
(1985) belle expérience humaine sur le tournage et grand succès en salle. Il s’agit
au départ d’un projet de François Truffaut qui en rédigea un traitement avec Claude
de Givray en 1983 mais qu’il ne put malheureusement pas tourner. Claude Miller,
directeur de production de François Truffaut de Baisers volés (1965) à L’Histoire
d’Adèle H (1975) et grand ami de ce dernier, est intéressé par le sujet et
s’avère donc le candidat tout désigné. Le script final oscillera ainsi entre
déférence à Truffaut et vraie dimension autobiographique pour Claude et Annie
Miller qui ont vécu cette période d’après-guerre à travers leur regard d’enfant/adolescent,
plusieurs personnages s’inspirant de membres de leur famille.
La très iconique affiche qui voit l’héroïne Janine
(Charlotte Gainsbourg) changer ses godilles pour enfiler des talons est un
manifeste du propos du film. Ce changement de chaussure symbolise à la fois la
volonté de passer de l’enfance à l’âge adulte, de son quotidien quelconque à
quelque chose de plus exaltant pour Janine. L’adolescente se sent étriquée dans
sa modeste province, dans l’humeur maussade et les vues étriquées par l’expérience
de l’Occupation de ses oncles et tante qui l’élèvent. L’ailleurs n’existe que
dans le clinquant des bijoux et vêtement de luxe, le glamour des stars de cinéma qu’elle s’empresse d’aller
voir sur grand écran, mais aussi de façon plus intime dans cette mère qui l’a
abandonnée pour vivre une aventure avec un italien. Cette frustration va donc
trouver pour Janine un périlleux raccourcis par les différents vols qu’elle va
commettre. Ce délicat pont entre l’adolescence et l’âge adulte va jouer sur la
nature et les conséquences de ses larcins, la mansuétude initiale face à la
candeur juvénile dont elle joue cédant à l’arrestation policière puis la maison
de correction.
Le film est un vrai pendant féminin à Les 400 coups (1959) que Claude Miller assume dans une narration
fonctionnant au rythme des sursauts émotionnels de Janine. Charlotte Gainsbourg
n’a plus la grâce et candeur instinctive de L’Effrontée,
cette fois si son jeu subtil laisse intelligemment fonctionner la frontière
indistincte entre duperie, petits mensonges et vulnérabilité. La douceur du
timbre, les mauvaises intentions travaillant certaines de ses expressions, toute
cette contradiction fascine dans le jeu
de l’actrice. Son rapport aux adultes le reflètent avec une confusion entre la
quête du père, de l’amant et de l’amie que vont revêtir son oncle, le
professeur de chorale (Didier Bezace) ou sa patronne qu’elle va autant aimer
que blesser au fil de ses errances. La relation la plus stable ne se trouvera
qu’avec son équivalent, ce Raoul (Simon de La Brosse) également en rupture de
tout.
Le film possède ainsi plusieurs niveaux de lecture entre les
réminiscences de Truffaut, ce étonnant rapport entre passé et présent où l’on
voit Charlotte Gainsbourg grandir et s’affirmer dans cette sorte de suite de L’Effrontée se situant pourtant
chronologiquement avant. Miller distille une reconstitution soignée qui sait se
faire oublier par une mise en scène sobre et au service de sa star en devenir.
Une nouvelle fois ce sera un immense succès avec 1,8 millions d’entrées en
salle.
Sorti en bluray et dvd zone français chez TF1 Vidéo
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