Jay est une
adolescente américaine vivant à Détroit. Après avoir fait l'amour dans une
voiture, elle est chloroformée puis attachée à une chaise roulante par son
petit ami Hugh. Alors qu'une femme aux intentions menaçantes apparaît au loin
et se rapproche, Hugh explique qu'il est victime d'une étrange malédiction
sexuellement transmissible par laquelle une créature multiforme cherche à
détruire la dernière personne atteinte par cette malédiction. Hugh a donc
transmis la malédiction à Jay, mais il sera de nouveau menacé si Jay est tuée
par la créature.
David Robert Mitchell confirme là les espoirs placés en lui
après son formidable premier film, la chronique adolescente The Myth of the American Sleepover
(2010). On passe du rêve au cauchemar entre ce galop d’essai et It Follows, la même atmosphère
cotonneuse, les héros adolescents et le cadre de la banlieue de Détroit servant
cette fois un pur récit d’épouvante. S’inspirant d’un cauchemar d’enfance où y
voyait la silhouette d’une créature inquiétante le suivre partout, Mitchell amène
un postulat aussi novateur que glaçant à son récit.
A la suite d’une relation
sexuelle, une terrifiante malédiction se transmet, voyant la victime poursuivie
par une entité adoptant différentes apparences humaines altérée et marchant
indéfiniment vers elle jusqu’à la tuer dans d’atroces circonstances et remonter
jusqu’à son partenaire pour une même sentence. C’est précisément la mésaventure
que va connaitre Jay (Maika Monroe) lorsque son petit ami Hugh (Jake Weary) la « contamine »
tout en lui donnant les règles pour échapper au monstre.
Le traitement de Mitchell diffère totalement du tout-venant
horrifique actuel où avec pareil postulat, on pouvait s’attendre à une orgie
sexuelle et un déchaînement de morts façon Destination
Finale. Rien de tout cela ici où au contraire l’angoisse va naître de cette
même tonalité suspendue vue dans The Myth
of the American Sleepover. L’indécision et le doute de ces adolescent quant
à leurs amours est ici remplacé ou du moins additionné à la terreur d’être
rattrapé par la créature. Le réalisateur caractérise d’ailleurs à nouveau
formidablement ses personnages dans leurs interrogations face à âge adulte (Jay
et Paul échangeant sur leurs souvenirs d’enfances, Jay se réfugiant dans un jardin
d’enfant après l’attaque de la chose), ce dernier représenté par cette
sexualité qu’ils ne savent pas appréhender et se manifestant sous un jour
surnaturel. Cela évite l'interprétation "moralisatrice" attendue même si l'analogie en la malédiction et les MST sera facile à faire.
D’ordinaire la peur au cinéma se ressent par des approches
bien connues. La peur de ce qu’on ne voit pas, que ce soit l’obscurité où
peuvent se tapirent des êtres/créatures innommables ou celles du hors-champs
avec là aussi le danger se devinant où surgissant soudainement dans le cadre.
Il y a aussi l’horreur plus graphique et direct où les visions explicites et
abjectes peuvent nous glacer d’effroi. Mitchell conjuguent toutes ces peurs
tout en en inventant une nouvelle. C’est ici au spectateur de chercher au fond
du cadre si une silhouette menaçante ne s’avance pas, si ce figurant anonyme l’est
vraiment et nous place ainsi dans le même état de paranoïa et d’anxiété que les
personnages. Il est même assez parcimonieux en vrais moment horrifiques, l’angoisse
latente créant l’essentiel du malaise inconsciemment ou concrètement durant les panoramiques nous incitant à "chercher" l'anomalie. Et quand l’horreur se manifeste
concrètement, cela s’avère constamment dérangeant, notamment par les visages
parfois bien connus des victimes qu’endosse l’entité (bien être attentif pour
la toute dernière).
L’ensemble conserve cependant un vrai aspect ludique et on
devine l’hommage/influence de Scoodby
Doo (y compris dans les looks des héros) dans la débrouillardise de nos héros
menant l’enquête, cherchant à détourner la malédiction ou à confronter la « chose ».
Cela participe aux romances déçues ou espérées de ces ados tout en teintant
certaines situations d’une vraie ambiguïté. Désespérée, Jay hésite à se donner
en pâture à trois garçons inconnus et une ellipse nous laisse dans le doute
quant à sa décision (le scénario explicitant qu’elle y renonçait).
Rien ne nous
dit ainsi qu’elle ait cédé et soi de nouveau poursuivie à cause de la mort de
ses partenaires ou qu’au contraire elle ait renoncée et maintenu la malédiction
sur elle (ce qu’explicitait le scénario). On devinait déjà l’influence de John
Carpenter dans son premier film et c’est d’autant plus vrai ici avec ce
cinémascope magistral instaurant la peur (par une vision qu’on ne sait jamais
si elle est subjective ou non) dans ce cadre pavillonnaire quelconque façon Halloween (1978) mais aussi le score
synthétique hypnotique de Disasterpeace. On pense aussi à des influences plus
classiques, le Jacques Tourneur de La
Féline (1942) étant explicitement cité et très bien réapproprié lors du
final à la piscine. Un des grands films fantastiques sorti ces dernières années,
une date.
Sorti en dvd zone 2 français et bluray chez Metropolitan
Je pense que le film ne tient pas ses promesses et même qu'il change de voie, notamment pour cette dernière séquence du piège autour de la piscine qui vient là pour donner une incarnation à cette chose qui ne devait pas se montrer, mais qui devait continuer de hanter les personnages... Quel dommage. L'intérêt résidait dans ces transmissions sans fin, sous peine de mourir, un peu comme il fallait montrer la vidéo dans Ring... J'imagine un film qui ne se termine pas, les personnages étant soumis à se transmettre le virus les uns aux autres, continuellement, la symbolique fait le reste... SandorK
RépondreSupprimerCela aurait été quand même très monotone (et pas beaucoup mieux qu'un Destination Finale) si le film n'avait été qu'une suite de transmission. Le final amène un aspect ludique et relance le suspense tout en maintenant sans doute la boucle de la malédiction avec cette fin ambiguë...
SupprimerJe ne pensais pas à quelque chose qui s'appuie sur un modèle systématique tel que dans Destination Finale, mais quelque chose qui n'aurait pas de prise, un peu comme chez Lynch, qui ne s'incarne pas, qui reste là, dans les impressions à hanter le film. SandorK
RépondreSupprimerLe côté "teen movie" exige sans doute ce côté un peu plus tangible pour relancer l'action et sans doute un peu trop concrétiser la menace. Malgré tout je ne trouve pas le film conventionnel même si bien référencé et cette menace flottante et indéfinie on la ressent tout de même dans la toute dernière image. En plus sobre je trouve que c'est dans l'esprit de la fin de "Les Griffes de la nuit" pour nous signifier plus ou moins que ce n'est pas terminé. Après j'espère qu'on va éviter les suites à répétitions qui vont déflorer le mystère...
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