Les Quatre Fantastiques est un nouvel avatar de la mode récente du reboot au sein des studios hollywoodiens, à savoir repartir de zéro quant aux origines d’un personnage afin de susciter un regain d’intérêt pour ses aventures. La pratique - reprise des comics mais appliquée sur tous types de personnages comme le James Bond débutant de Casino Royale (2006) - n’est pas si nouvelle mais était autrefois plus espacée dans le temps afin de susciter l’attente et l’évènement pour le retour (8 ans s’écoulant entre le raté Batman et Robin (1997) de Joel Schumacher et la reprise saluée de Christopher Nolan Batman Begins (2005)). Depuis, les choses se sont accélérées en dépit du bon sens avec un Amazing Spiderman (2012) produit alors que Spider-Man 3 (2007) est sorti cinq ans auparavant ; ou le futur Batman vs Superman alors que la saga de Nolan est encore dans les esprits. Cette logique purement mercantile peut néanmoins être l’occasion de redonner une chance à des personnages dont la transposition fut franchement ratée au vu du potentiel. C’est le cas des Quatre Fantastiques, premiers héros majeurs de la firme Marvel, qui inaugurèrent le concept d’équipe de super-héros avec l’originalité de constituer une famille. Si l’on excepte la production Corman fauchée et invisible de 1994, les personnages avaient eu droit à de bien piètres adaptations avec les deux films de Tim Story (Les Quatre Fantastiques et Les Quatre Fantastiques et le Surfer d’argent en 2005 et 2007), relativement fidèles mais gâchés par un humour bas du front et une exécution sans ampleur. Finalement Les Indestructibles (2005) de Brad Bird constituait une adaptation officieuse autrement plus convaincante.
Josh Trank s’était fait connaître avec le très bon Chronicle (2012), une des rares
réussites de found footage, où il entremêlait mélodrame adolescent, film de
super-héros et même japanimation avec son final sous influence Akira. Josh
Trank rajeunit ici les personnages afin de prolonger les thèmes de son premier
film avec ses post-adolescents de génie qui vont voir leur destin bouleversé
par une expérience scientifique. La première partie est remarquable, Trank se
montrant fidèle tout en modernisant intelligemment l’univers des comics –
l’exposition au rayons cosmique laisse sa place au voyage transdimensionnel
pour les origines. On alterne ainsi avec une imagerie banlieusarde bleutée et
fantastique des productions Amblin (tout le début sur les premières expériences
de Red Richards) et de hard science donnant un côté plus sombre et presque
horrifique à la découverte des pouvoirs par les héros. Miles Teller (révélation
de The Spectacular Now (2014) et Whiplash (2014)) est remarquable en
scientifique ingénu et déterminé et le reste du casting répond bien au canon
des personnages tout en étant revisités par Josh Trank. Cela fonctionne
vraiment bien et on croit enfin voir l’adaptation rêvée durant la première
heure.
Les tensions ayant fuité entre Josh Trank et la Fox gâchent
malheureusement la suite. Le studio et sa gestion chaotique des blockbusters
avaient constitué un catalogue catastrophique pour les années 2000, qui s’était
répercuté justement sur la première version ou certaines suite et/ou
déclinaison des X-Men (X-Men 3 (2011) ou Wolverine (2013)). Ici, il semble retomber dans ses travers
interventionnistes et mercantiles tant la seconde heure est ratée. Les enjeux
se diluent avec l’arrivée tardive et ratée du méchant, un gros ventre mou à
mi-parcours et un final spectaculaire expédié. De même, l’interaction des
personnages se fait dans une urgence (la relation entre Red et Ben si bien
amenée parait inaboutie, le sort du mentor Frank Storm est anecdotique…)
sentant le compromis et l’ensemble ne semble jamais dépasser le stade de
l’introduction inaboutie. On devine les changements de direction déviant de
l’option initiale, le côté sombre et intimiste cédant à une pyrotechnie vu et
revue ailleurs (le côté aventure dépaysante typique des comics étant aux
abonnés absents), comme si le studio avait craint d’assumer l’approche de Josh
Trank. Un vrai gâchis au vu des promesses initiales, qui condamne les Fantastic Four à un nouveau purgatoire
cinématographique – à moins d’un succès inespéré.
En salle
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