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jeudi 22 décembre 2022

Madame Curie - Mervyn LeRoy (1943)


 L'histoire de la physicienne franco-polonaise Marie Skłodowska-Curie dans les années 1890 à Paris alors qu'elle commence à travailler dans le laboratoire de son futur mari, Pierre Curie.

Madame Curie s'inscrit dans ce courant de biopics prestigieux du cinéma hollywoodien entamé dans les années 30. Pour ce projet, il s'agit de rebondir sur la publication en 1937 de Madame Curie, biographie écrite par Eve Curie, fille de Pierre et Marie Curie. Universal en achète rapidement les droits et envisage Irene Dunne dans le rôle-titre, l'actrice se rendant même en Europe pour rencontrer Eve Curie. Le projet piétine et la MGM en récupère les droits avec là aussi de longues années d'atermoiements, de casting avorté (Greta Garbo dirigée par George Cukor, Joan Crawford postulant mais rejetée par le studio ce qui sera une des raisons de son départ pour Warner), et ce même une fois la production lancée puisque Mervyn LeRoy remplace un Albert Lewin congédié peu après le début du tournage. Cette fois le projet semble sur les rails puisqu'il s'agit de la troisième des quatre collaborations de LeRoy avec la star anglaise Greer Garson (dont le très beau mélo Prisonnier du passé (1942)) et que cette dernière retrouve pour la quatrième fois comme partenaire Walter Pidgeon, leur "couple" à l'écran rencontre alors grandement les faveurs du public - notamment avec le célèbre Madame Miniver de William Wyler l'année précédente.

Madame Curie est un biopic grandement romancé qui occulte tous les éléments s'éloignant de la sphère du couple Curie (la famille de Marie Skłodowska, son engagement social et politique pour le développement de sa Pologne natale) et de leurs recherches scientifiques. La première partie se concentre sur la rencontre et la romance entre Marie Skłodowska (Greer Garson) et Pierre Curie (Walter Pidgeon) qui se rapprochent progressivement alors qu'ils sont amenés à partager un labo. C'est charmant et piquant à souhait, les ressorts romantiques hollywoodiens se pliant bien à la profession particulière des protagonistes. Pierre Curie est un doux-rêveur mal à l'aise en public et entretenant des préjugés sur les femmes qui vont voler en éclat au contact de Marie qui le subjugue certes par sa beauté mais surtout par son intellect et mènent avec lui de passionnantes discussions théoriques. En quelques séquences (le retour en parapluie) le tour est joué et Greer Garson est tout aussi attachante en rigide fendant peu à peu l'armure. 

Dès lors le film se déleste de toute futilité pour dépeindre en détail et avec un vrai travail de vulgarisation pour le spectateur néophyte la nature de leurs recherches sur le radium, le travail de longue haleine pour isoler cette matière. Les ellipses font ressentir le poids du temps qui passe, les conditions spartiates et le laborieux travail physique qu'implique chaque étape pour séparer le radium. C'est parfaitement didactique et remarquablement écrit, la patience, la joie et les déceptions des réussites et tâtonnements divers sont très bien retranscrits. Pour éviter la froideur quasi documentaire, la voix-off de James Hilton vient dépeindre chaque étape avec emphase et Mervyn LeRoy se montre plutôt inspiré formellement tant dans le registre romanesque (décors et environnements somptueux dans la première partie) que celui scientifique notamment la très belle scène passant de la joie à la peine puis encore la joie dans la matérialisation "visuelle" du radium comme une sorte de miracle religieux.

L'alchimie entre Greer Garson et Walter Pidgeon fait toujours autant d'étincelle, notamment dans ce registre scientifique où obnubilé par leurs travaux ils parviennent par leur seule connexion amoureuse/intellectuelle à s'évader par le dialogue de situations/cadres sociaux totalement extérieurs. On pourrait croire qu'ils sont une association davantage qu'un couple mais au cœur de ces efforts, dans l'urgence de leurs travaux que se révèlent pleinement et pudiquement leurs sentiments mutuels. On pense à la très belle scène où triste de voir Marie repartir pour la Pologne, Pierre ne tente de la retenir que par ce ressort scientifique tout en y glissant une demande en mariage. 

Cela pourrait être vexant ou incompréhensible pour une autre, mais Marie saisit immédiatement ce que Pierre cherche à exprimer. Plus tard dans le film, après des années de vie commune, une des plus belles scènes voit Marie faire une magnifique et explicite déclaration d'amour à cet époux qui l'a toujours soutenue, entérinant ce lien hors du cadre scientifique. Néanmoins, la dernière demi-heure laissant place aux honneurs et au mélo plus explicite (et prévisible même sans connaître sur le bout des doigts la biographie des Curie) est un poil longuette sans la dynamique et la tension du travail de recherche du duo. Un très joli film néanmoins !

Sorti en bluray chez Warner et doté de sous-titres anglais

2 commentaires:

  1. J'ai eu la chance de voir le biopic de 2016 réalisé par Marie Noëlle. Je n'avais aucune nouvelle de cet autre, bien que votre analyse minutieuse a éveillé ma curiosité.

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    1. Oui j'ai vu aussi la version 2016 en salle, les deux sont bien complémentaires même si je préfère le film de Mervyn LeRoy.

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