Afin de pouvoir étudier, une jeune fille accepte de se déguiser en garçon et de porter une ceinture de chasteté conçue par son père et équipée de nombreux gadgets. Tellement inviolable que l'un de ses amis s’y broiera le pénis et devra se faire greffer un organe de cheval à la place. En tentant de le guérir auprès d’un taoïste, ils vont croiser la route d’un démon absorbant l’énergie vitale des humains lors de l’acte sexuel.
Sex and Zen 2 est la suite tardive de Sex and Zen de Michael Mak (1991), fleuron du controversé label Catergory 3 au sein du cinéma hongkongais. Le premier volet s’était avéré une étonnante réussite mariant l’érotisme soft avec les atmosphères et l’imagerie du wu xia pian fantastique. Plus précisément, le film était sous la haute influence de la trilogie Histoires de fantômes chinois (1987, 1990, 1991) produite par Tsui Hark dont il se démarquait en rendant explicites l’érotisme plus suggestif et romantique de celle-ci. Michael Mak puisait aussi son inspiration dans la culture classique chinoise, en adaptant La Chair comme tapis de prière, classique de la littérature érotique chinoise écrit par Li Yu au 17e siècle, et aussi à travers l’iconographie picturale chinoise riche en vision grivoise. Tout cela se tenait assez brillamment par sa beauté formelle qui donnait un rendu chatoyant à ce produit d’exploitation.
Le film fut un grand succès mais la production s’avéra houleuse entre un Michael Mak souhaitant imposer sa vision et le studio Golden Harvest. Cela explique les cinq ans séparant les deux œuvres, une hérésie dans un cinéma hongkongais bien plus prompt à réitérer la moindre formule à succès. Michael Mak refusant de revenir, le projet est confié à Wong Jing, producteur stakhanoviste et opportuniste pour lequel le profit prévaut sur la réussite artistique. Il va déléguer la réalisation à Man Kei Chin, spécialiste de ce type de cinéma érotique quand le bagage de Michael Mak avait réussi à élever l’argument de départ. Il n’en est rien ici même si, une nouvelle fois, l’inspiration est à chercher du côté de Tsui Hark. Le réalisateur sortait de deux de ses plus éclatantes réussites, Green Snake (1993) et The Lovers (1994) inspirées de contes traditionnels chinois. Sex and Zen 2 reprend au début le postulat de The Lovers avec cette jeune héroïne (Loletta Lee) en quête d’indépendance qui va se travestir en garçon pour pouvoir quitter le foyer et étudier malgré l’injonction paternelle. On retrouve quelques situations équivoques mais au trouble et à la confusion des genres de Tsui Hark, c’est la vulgarité et l’humour franchement paillard qui est privilégié. Sex and Zen 2 tente aussi de reproduire l’esthétique sophistiquée et onirique de Green Snake, mais de la photo au cadrage en passant par le cabotinage des acteurs, tout paraît toujours trop forcé, maladroit et criard pour ne serait-ce que titiller le bijou de Tsui Hark. Ce n’est finalement que dans son versant érotico-horrifique que le film convainc davantage quand se présente l’antagoniste démoniaque et sensuelle incarnée par Shu Qi.Malgré dans ce registre de nouveaux quelques éléments volés à Tsui Hark (Loletta Lee dans sa bassine d’eau baignée de pétales faisant inévitablement penser à Joey Wong dans Histoires de fantômes chinois), la nature bisexuelle et transgenre du démon nous emmène vers un érotisme plus inattendu qui va davantage chercher du côté du Japon et ses hentai. Nous sommes presque face à une version live et plus soft d’un animé comme Urotsukidoji (1987) lorsque Shu Qi sous forme démoniaque et armée de tentacules fait subir les derniers outrages à ses rivales féminines, où quand un scorpion géant amovible sert à déployer les postures les plus folles du Kâma-Sûtra. L’ensemble est trop putassier pour approcher Tsui Hark ou même réitérer l’équilibre miraculeux du premier film, mais l’humour grivois et l’érotisme assumé fonctionnent plutôt bien dans l’ensemble.On le doit notamment aux deux stars féminines aux trajectoires étonnamment inversées. Loletta Lee ici en jeune naïve découvrant l’ivresse des sens a débutée par des rôles solides dans du cinéma classique et populaire (Shanghai Blues de Tsui Hark (1984), Final Victory de Patrick Tam (1986), All's Well, Ends Well de Clifton Ko (1992)…) avant par intérêt financier de se réorienter vers le Catérogy 3 et le cinéma érotique – choix fatal qui l’enfermera dans ce genre. Au contraire la taïwanaise Shu Qi fait ses premiers pas dans le cinéma d’exploitation où elle se dénude plus qu’à son tour, avant de devenir l’égérie de tout un pan du cinéma d’auteur asiatique grâce auquel son talent va se révéler (Beijing Rock de Mabel Cheung (2001), Millenium Mambo (2001), ThreeTimes (2005) et The Assassin (2015) de Hou Hsiao-hsien). Toutes deux assument l’outrance du récit par des performances décomplexées et sensuelles, et contribuent au seul vrai moment de génie et d’invention dans le climax final. Un coït frénétique se transforme en sorte de duel westernien où leurs deux personnages doivent se retenir de ne pas jouir le premier sous peine d’avoir toute son énergie aspirée par l’autre, en métaphore ludique de la petite mort. Un spectacle amusant si l’on parvient à faire fi de sa trop lourde inspiration.Sorti en bluray et dvd chez Spectrum Films
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