Alors que la jeune et ravissante Ray
Schmidt aurait dû se fiancer avec Walter Saxel, un contretemps et un
malentendu les séparent. 5 ans après le hasard les réunie. Lui est
désormais marié et père, elle célibataire et hésitant à épouser son
ancien voisin. Elle devient donc sa maîtresse mais a dû mal à vivre dans
l'ombre de sa vraie famille.
Un magnifique mélodrame où
John Stahl signe un des plus beaux films sur "l'autre femme". Ce sera
ici le récit d'un amour inconditionnel et sacrificiel d'une vie pour Ray
(Irene Dunne) pour l'homme marié qu'est Walter (John Boles). Ray est
une jeune fille de Cincinnati aimant s'amuser mais jamais sans se livrer
réellement. Que ce soit les avances balourdes de représentant de
commerce croisés lors de bal ou la demande en mariage sincère de Kurt
(George Meeker), son voisin amoureux d'elle, Ray n'y donne pas suite car
elle attend d'aimer sincèrement.
Elle l'affirmera concrètement dans un
dialogue, elle ne peut se lier inconsidérément, car quand elle aime,
c'est tout ou rien et elle sera prête tout y sacrifier. Elle en fera
l'amère expérience en rencontrant Walter, fils de bonne famille déjà
fiancé. Leur amour est dès le départ placé sous le signe de la
dissimulation même si leur jeunesse y donne facette de jeu et que les
rencontres n'en sont que plus fougueuses. Pourtant le mariage approche
et un rebondissement malheureux empêchera le rendez-vous qui aurait pu
tout changer lorsque Walter tentera de présenter Ray sa mère.
Se
retrouvant quelques années plus tard aussi amoureux que jamais New
York, Walter et Ray reprendront leur liaison clandestine. Désormais
adultes, mariés (Walter) ou en âge de l'être (Ray), le couple voit le
cycle de l'amour secret reprendre mais dans des proportions plus
douloureuses et dramatiques. Pour Ray ce seront un quotidien dépendant
et toujours en attente de la disponibilité de l'autre, une vie où elle
ne peut rien espérer et construire pour elle-même. Même si cela reste
sous-jacent, on devine aussi pour Walter une vie familiale à laquelle il
ne peut jamais vraiment profiter ses pensées étant toujours en partie
consacrée à "l'autre". La force du film (adaptant un roman de Fannie
Hurst, également auteur des livres dont furent tirées les deux versions
de Mirage de la vie) est
l'absence de jugement moral et la profonde empathie ressentie pour la
passion des personnages.
A ne pas quitter son épouse sans se résoudre
non plus à laisser Ray vivre sa vie, Walter pourrait passer pour un être
égoïste. Pourtant on le verra simplement comme contraint par les
conventions mais sincèrement amoureux. De même Ray pourrait passer pour
une femme faible et sans résolution propre. Mais elle est bien
consciente de l'impasse de sa situation sans accepter d'en sortir. Irene
Dunne exprime magnifiquement cela dans la scène où elle tente de
raisonner sa voisine qui vit un dilemme similaire, mais il suffira du
retour de Walter dans la minute pour contredire ces mêmes conseils
qu'elle vient de donner.
C'est ainsi l'amour exclusif et secret
d'une vie qui va se dérouler, Walter vivant une existence idéale de
façade tandis que dans son ombre le suivra toujours celle représentant
son existence secrète mais bien plus réelle. Stahl joue magnifiquement
de cette double lecture dans la dernière partie, capturant l'émotion
avec une force rare dans les gros plans sur les visages habités d'Irene
Dunne et John Boles ou dans ce beau travelling arrière laissant Ray seule au monde après l'entrevue avortée. Ainsi liés de corps et d'esprits, les amants ne
pourront se survivre bien longtemps après tant de sacrifices dans le
superbe final.
Sorti en dvd zone 2 français chez Universal
Extrait
Tótem (2024) de Lila Avilés
Il y a 43 minutes
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire