En 1861, le sergent John Kennedy
découvre un complot visant à éliminer le président Abraham Lincoln. Face
à l'incrédulité et à l'inertie de ses supérieurs, Kennedy mène sa
propre enquête, après avoir démissionné de l'armée...
Anthony Mann signe un formidable suspense à la croisée des genres avec ce palpitant The Tall Target.
Le récit se situe dans un cadre de western, genre dont le réalisateur
s'est emparé l'année précédente avec des classiques instantanés (La Porte du diable, Les Furies et Winchester 73) et à venir (Les Affameurs (1952), L'Appât (1952), L'Homme de l'Ouest
(1958)...) mais la trame s'inscrit plutôt dans le thriller. Mann usera
donc plutôt là des recettes de suspense qui firent toute l'efficacité de
ses films noirs de série B (L'engrenage fatal (1947), La Brigade du suicide
(1947)...) conjugué à une production plus nantie. La trame dépeint la
course contre la montre du sergent John Kennedy (Dick Powell) devant
démasquer un complot visant à assassiner Abraham Lincoln qui s'apprête à
être investi et donner un discours à Baltimore. Notre héros s'embarque
en urgence dans le train comprenant les comploteurs voire peut-être
Lincoln et le scénario diabolique ainsi que la maestria de Mann va nous
tenir en haleine.
Avant que l'intrigue s'installe dans le train,
Mann installe subtilement le contexte explosif qui agite le pays et les
émotions contrastées que suscite la politique de Lincoln : soutenu par
les abolitionnistes, détesté par les hommes d'affaires perdant des
marché du fait de la Guerre de Sécession, par les sudistes voyant leur
monde s'écrouler. Mann ne surligne jamais cet aspect par le discours
mais en fait plutôt un climat ambiant au détour d'une coupure de
journal, d'une conversation prise sur le vif. Dès lors le train va
constituer un microcosme surchauffé de cet état d'esprit, renforçant la
paranoïa de Kennedy et le danger incertain régnant dans ce lieu confiné.
Le scénario est formidablement astucieux dans ses rebondissements,
éventant rapidement certaine piste, en laissant habilement d'autres dans
le flou et en s'accrochant au point de vue de Kennedy pour ainsi nous
faire partager ses doutes.
Faux-semblants, double jeu et usurpation
d'identité nous n'aurons pas une minute de répit tout au long des 75
minutes. La mise en scène fait merveille pour faire surgir le danger de
manière inattendue (ce mouvement de caméra qui nous fera découvrir ce
pistolet braqué dans le dos de Kennedy), les éclairs de violence
saisissants avec une bagarre brutale dans la fumée d'une gare sur les
rails (ou les gêneurs balancé prestement du train) et la manière habile
dont les masques tombent.
La plupart des protagonistes sont des
miroirs de ce contexte politique plus ou moins développés : le jeune
officier sudiste sera assez monolithique/glacial et d'autant plus
inquiétant, Ruby est très touchante en esclave s'interrogeant sur sa
possible liberté et Adolphe Menjou amène son raffinement habituel à ce
militaire cherchant à profiter au mieux de la tournure des évènements.
Dick Powell représente lui le juste habité par la cause, marqué à jamais
par sa seule rencontre avec Lincoln qu'il fera tout pour sauver.
L'interprétation virile et déterminée prend un tour plus humain et
enrichit le personnage dans sa quête. Trépidante, habilement construite
et superbement interprété, une des grandes réussites d'Anthony Mann.
Sorti en dvd zone 2 français chez Warner
Extrait
Tótem (2024) de Lila Avilés
Il y a 30 minutes
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire