Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

Pages

mardi 4 juin 2019

Les Virtuoses - Brassed Off, Mark Herman (1996)

Au milieu des années 1990, dans le petit village de Grimley, dans le nord de l'Angleterre, des mineurs et leurs familles se battent contre la fermeture de leur mine dans le cadre du programme national de fermeture des houillères au Royaume-Uni. Parmi eux, un brass band qui manque d'espoir, conduit par Danny (Pete Postlethwaite). Ils sont partagés entre leur amour de la musique et leur espoir de participer à la finale du championnat national des brass bands, et la perspective de perdre leur travail et de voir leur communauté se disloquer.

Les Virtuoses s'inscrit avec The Full Monty dans ce courant de comédies douces-amères anglaise où un argument ludique et original permettait d'introduire un constat social fort quant au monde ouvrier anglais. Les deux films évoquent la situation alors sinistrée de deux industries anglaises sur le déclin -dont le cœur se situe au nord de l'Angleterre-, la métallurgie pour The Full Monty et minière dans Les Virtuoses. Le film est vindicatif envers la politique austère du Parti Conservateur pratiquée en Angleterre depuis l'arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher en 1979 et poursuivie par John Major au moment de sa sortie en salle. Il se situe ainsi dans un ras de bol général qui contribuera à l'élection de Tony Blair en 1997. Le film s'inspire en partie de faits réels soit la vraie histoire du Grimethorpe Colliery Band, brass band de mineur au début des années 90 - et qui jouent d'ailleurs sur les séquences musicales du film.

Le contexte de l'histoire illustre en quelque la suite une décennie plus tard des révoltes minières violentes de 1984 où les ouvriers au prix de grands sacrifices avaient réussis à préserver leur industrie. La mine de Grimley se trouve de nouveau menacée de fermeture et les protagonistes, désormais usés (financièrement comme physiquement) par les luttes passées hésitent entre accepter la généreuse (et temporaire) prime de licenciement ou poursuivre le combat. Seul éclaircie dans cet environnement sinistre, la fanfare de l'usine menée par le patriarche Danny (Pete Postlethwaite) et le rêve d'accéder à la final du championnat national des brass band se déroulant dans la prestigieuse salle du Royal Albert Hall. Le récit tisse un portrait vrai et attachant d'un groupe de personnage au bord du gouffre moralement, financièrement comme psychiquement.

Stephen Tompkinson livre notamment une magnifique prestation en clown triste constamment au bord de la rupture, Pete Postlethwaite est tout aussi poignant en vieux roc agrippé au groupe en ultime objectif, et également Ewan McGregor en jeune aux abois. L'humour et l'habile répétition de situations (ce père de famille croisant tous les jours sa femme allant militer pour le maintien de l'usine quand lui n'en a plus la force) dessinent cet arrière-plan sinistre que seul les séquences musicales viennent enluminer. Celles-ci ne sont pas si nombreuses et pas toujours filmées avec inventivité par Mark Herman. Il réserve l'emphase de ces passages pour les moments clés et on retiendra la magnifique scène qui introduit Gloria (Tara Fitzgerald) à la trompette, moment prodigieux qui nous envoute par la magie du Concerto d'Aranjuez de Joaquin Rodrigo et la communion captée du brass band - et en montage alternée leur tragédie syndicale en marche. L'autre grand moment tient plus à l'émotion de la scène lors du final où est joué le plus connu Guillaume Tell de Rossini.

Le film tient idéalement un équilibre fragile entre pessimisme profond lié au contexte qui ne déviera pas de sa trajectoire, et un optimisme représenté par la vigueur intacte des protagonistes, idéalisé dans la conclusion (l'intégrité de Gloria) mais surtout vibrant d'authenticité à l'image du discours final de Pete Postlewaite. Ce dernier porte le film à bout de bras, à la fois exalté et incroyablement crédible en mineur prématurément vieilli et usé (alors que l'acteur avait tout juste la cinquantaine). Toujours aussi actuel et touchant.


Sorti en dvd zone 2 français chez Film Office 

Extrait

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire