Biographie du célèbre
peintre hollandais Vincent van Gogh : sa piété, ses amours déçues, l'amour
qu'il porte à son frère, son caractère et, surtout, sa dévotion obsessionnelle
à la peinture et au dessin - responsables de sa « folie » - nous sont contés.
Vincente Minnelli a souvent affirmé que Lust for life était son favori au sein de sa filmographie. C’est un
projet qu’il caressait depuis de longues années et l’acquisition par la MGM en
1945 des droits du roman éponyme d’Irving Stone paru en 1934. Les projets
avortés se multiplient au fil des années – Richard Brooks, Jean Renoir
envisagés à la réalisation et Paul Muni, Van Heflin, ou encore John Garfield en
Van Gogh – au point que l’option sur le roman au bout de 10 ans approche
dangereusement de son terme. Alors qu’Irving Stone refuse de la renouveler et s’attèle
déjà à trouver de nouveaux interlocuteurs pour transposer son roman, Vincente
Minnelli manifeste son intérêt au studio qui accepte mais avec la contrainte d’un
tournage dans l’urgence avant la perte des droits.
Minnelli trouve son Van Gogh en la personne de Kirk Douglas,
déjà remarquable en créateur jusqueboutiste s’aliénant son entourage dans Les Ensorcelés (1952) - on peut ajouter Madame Bovary (1949) autre figure Minnellienne courant à sa perte en voulant calquer un idéal à sa réalité. Minnelli voit
dans le peintre un être en quête de transcendance dans son rapport au monde
mais qui cherche encore sa voie pour s’exprimer. Son tumulte intime l’empêche
de se réaliser dans le carcan et l’hypocrisie du sacerdoce religieux, tout
comme sa réelle empathie ne lui permet pas de tutoyer le labeur des
travailleurs qu’il accompagne. Durant tous ces rendez-vous manqués, il
griffonne fiévreusement tout ce qu’il observe et comprend que c’est peut-être
par l’image qu’il pourra communiquer au monde ce qu’il ressent. Ces émotions à
vif sont à la fois motrices et destructrices, dans la création comme son
rapport aux autres. Sa quête d’absolu le rend tour à tour effrayant ou
attendrissant pour les femmes qu’ils aiment, et en fait un être agité et imprévisible
selon l’inspiration en ébullition ou asséchée face à sa toile.
Bien évidemment
tous ces sentiments contradictoires se traduisent dans la mise en scène de
Minnelli.Toute l’esthétique de la première partie du film obéit à la
l’esthétique d’un film hollywoodien de l’époque. Tant que Van Gogh ne s’est pas
trouvé en tant qu’artiste, tous les environnements traversés sont filmés en
studio, terrain de prédilection de Minnelli à travers ses comédies musicales notamment.
Tant que le regard, la sensibilité de l’artiste ne se sont pas ouverts, tant qu’il
est maintenu par des carcans à la fois psychologiques et techniques face à son
art, son environnement obéit à cette facticité. Il n’y a qu’à voir certaines
transitions pour rendre la chose frappante notamment lorsqu’il retourne chez
ses parents. On passe d’une scène où il capture la réalité des travaux fermiers
en extérieur à une autre de pique-nique à l’atmosphère pastorale fabriquée et où
logiquement le rejet de Kay (Jeanette Sterke) à qui il déclare son amour.
C’est donc une même démarche qui anime Minnelli pour lequel
la tangibilité des environnements se conjugue à la création des œuvres dans le
cheminement de Van Gogh. Il obtiendra l’autorisation
d’une vingtaine de musées, galeries d’art et collectionneurs privés à travers
le monde pour photographier les œuvres originales qui apparaîtront durant le
film. Il quitte ainsi le confort du tournage en studio pour aller filmer les
lieux mêmes où vécu Van Gogh aux Pays-Bas, en France et en Belgique. La ville d’Arles
et son atmosphère estivale devient alors un stimulant que Minnelli traduit
parfois comme une épiphanie visuelle (cette scène de réveil où Van Gogh est
subjugué par le paysage, les arbres printaniers battus par le vent) ou un cocon
chaleureux où l’artiste peut enfin s’épanouir.
C’est seulement là que les
vraies peintures de Van Gogh viennent entrecouper sa ferveur créatrice à l’écran,
dans une approche rappelant en plus réussi le Moulin Rouge de John Huston (1953). Pour entremêler la vérité
artistique et biographique de Van Gogh, Minnelli va imposer à la MGM du Ansco
Color issu d’un laboratoire qui avait fermé mais dont le procédé était plus
fidèle (que Eastmancolor désormais dominant au sein du studio) à la gamme
chromatique des peintures de l’artiste. C’est particulièrement payant lors de
toutes les transitions où l’on passe du paysage à la peinture et inversement,
dépassant le seul émerveillement formel pour comprendre, ressentir la pensée et
volonté de Van Gogh.
Lust for life est
aussi un film profondément tourmenté et oppressant dans ce qu’il traduit de la
psychologie instable de Van Gogh. Trop investi dans son art, trop en demande
dans ses affects, il est surinvesti et constamment au bord de la rupture. C’est
le fil rouge du récit où il ne cesse de combattre la solitude mais voit cette
demande trop ardente et dévorante pour les autres l’y condamner. Cela culmine
dans la dernière partie et la cohabitation avec Paul Gauguin (formidable
Anthony Quinn) qui à l’inverse à fait de la froideur et sa facilité à distendre
les liens un moteur créatif, quoiqu’il en coûte. Le Van Gogh des derniers
instants du film apparait donc comme résigné et avoir tout essayé.
Sorti en bluray et devd zone 2 français chez Warner
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