James Bond enquête sur le vol de puces électroniques commis par un mystérieux criminel. Apparait rapidement un lien entre cette affaire et le riche industriel Max Zorin, passionné de chevaux. De Paris à San Francisco, il faudra à 007 toute son énergie pour éviter une catastrophe écologique doublée d’un renversement des valeurs économiques à échelle mondiale...
Avec le bariolé et virevoltant Octopussy (1983), Roger Moore avait remporté (sur le plan commercial et qualitatif) la « guerre des Bond » face à Jamais plus jamais sorti simultanément et qui voyait le bref retour de Sean Connery dans cet épisode non officiel. Roger Moore s’affirmait donc là pour le grand public contemporain comme LE James Bond. Malgré les fautes de goût de certains films, l’acteur s’était brillamment approprié le rôle, y apportant la fougue, le panache et l’humour distancié qui le différenciait d’un Sean Connery démotivé sur Les Diamants sont éternels (1971). Cependant Roger Moore vieillit et incarne donc un Bond un peu plus marqué dans Rien que pour vos yeux (1981) et Octopussy sans que cela entache l’allant des films. Ce sera malheureusement le cas sur Dangereusement votre, l’épisode de trop pour Roger Moore approchant la soixantaine et désormais dépassé par la jeunesse du cinéma d’action émergeant du côté des Etats-Unis avec Sylvester Stallone, Arnold Schwarzenegger, Harrison Ford et les Indiana Jones. Cela est visible dans les scènes d’action où la plus infime bagarre réclame désormais une doublure, le film devant à Moore l’infâme surnom de « l’homme qui se faisait doubler même pour s’asseoir ».
C’est assez injuste pour Moore qui sur l’ensemble de ses Bond a plus donné de sa personne niveau cascade que Sean Connery (il a par exemple passé un permis bus pour conduire l’engin de Vivre et laisser mourir (1973), et effectué en grande partie l'haletante scène d'escalade de Rien que pour vos yeux). Cela se remarque aussi dans les tenues vestimentaires, Moore autrefois si félin à des allures de vieil oncle quand il s’infiltre en survêtement informe dans la base du méchant, et paraît terriblement ringard dans une tentative de faire jeune lorsqu’il arbore un blouson en cuir. L’acteur en se rendant compte sur le tournage qu’il est plus âgé que la mère de la James Bond girl Tanya Roberts comprendra son désormais anachronisme et décidera de tirer sa révérence. Passé ces écueils Dangereusement votre même si loin d’atteindre les sommets de la saga (ni même de la période Roger Moore) se regarde sans ennui. Le scénario est une sorte de remake modernisé de Goldfinger (1964) où un riche mégalomane veut annihiler la concurrence de la Silicon Valley pour s’assurer le monopole sur les puces électroniques. Christopher Walken en psychopathe peroxydé apporte une étrangeté menaçante et imprévisible (cet incroyable scène où il abat ses ouvriers à la mitraillette dans un grand éclat de rire) à ce Max Zorin, renforcé par le background du personnage supposé être le fruit d’expériences génétiquess russe pour concevoir un être de génie. Grace Jones en « femme de main » constitue une redoutable adversaire également, avec une vraie présence de panthère menaçante et aux tenues extravagantes. Ce duo apporte un vrai souffle de modernité face à la vieille garde bondienne puisque Patrick « John Steed »Macnee est au casting (renforçant les liens entre Chapeau Melon et bottes de cuirs et James Bond après Honor Blackman dans Goldfinger, Diana Rigg et Joana Lumley dans Au service secret de sa majesté (1969)), et que certains habitués font leur dernière apparition comme Lois Maxwell en Miss Moneypenny. La première partie du film en France est assez remarquable. Le cadre touristique est très bien utilisé avec un affrontement sur la Tour Eiffel (même si Moore a le souffle court pour dévaler les marches) puis une course poursuite dans les rues de Paris (parfaitement réglée par le regretté Rémy Julienne) qui se termine sur une péniche. La menace et le mystère fonctionnent vraiment dans ce milieu hippique et on savoure un Roger Moore à l’aise qui enchaîne les mots d’esprit. La seconde partie à San Francisco est nettement moins convaincante. On y repère une tentative d’américanisation de Bond pour le rajeunir, que ce soit par les tenues vestimentaires évoquées plus haut, ou par des scènes d’actions à la « Blues Brothers » mécaniquement intégrées au récit avec des sursauts d’humour façon Police Academy qui rappelle les errances comiques de Vivre et laisser mourir et L’Homme au pistolet d’or (1974) et son insupportable shérif Pepper. Le rythme est mou et laborieux, les morceaux de bravoures poussifs (l’incendie dans la mairie) et très clairement la doublure de Roger Moore a plus de présence à l’écran que l’intéressé. On aura un petit sursaut d’intérêt lors de la conclusion avec l’originalité du plan de destruction de Zorin, le revirement de Mayday (Grace Jones) sans céder au cliché de la saga en l’attribuant à un amour pour Bond, et le climax du haut du pont du Golden Gate bien que mollement exécuté n’est pas dépourvu de suspense. Le seul point ou la tentative de lifting est vraiment réussie concerne la bande-originale de John Barry. Le compositeur restait dans un certain classicisme bondien depuis L’Homme au pistolet d’or (malgré les quelques écarts disco de Moonraker (1979)) mais là embrasse pour le meilleur les sonorités des années 80. Le morceau A View to A Kill composé avec les « Nouveaux Romantiques » de Duran Duran est percutant en diable et sa mélodie imparable imprègne tout le score, que ce soit pour de somptueuses pièce romantiques symphoniques (l’instrumental Bond meet Stacy sur la bande originale est une merveille romantique) ou les élans héroïques où s’invite la boite à rythme et le synthétiseur. La musique dynamise à elle seule la tenue mollassonne du film et Barry poursuivra brillamment dans cette voie sur le suivant Tuer n’est pas jouer (1987). Des adieux honorables de Roger Moore donc, avant que Timothy Dalton vienne apporter un sacré sang neuf.Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Sony
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