En 1917, à Fatima, au Portugal, trois jeunes enfants bergers, Lucia, Jacinta et Francisco, voient apparaître, au moment où ils récitent le chapelet, une dame qui leur dit être la Vierge Marie et qui leur demande de revenir au même endroit, chaque mois, à la même date, pendant six mois. Les parents et le curé du village croient à un mensonge mais une foule de curieux accourt chaque mois, de plus en plus nombreuse.
John Brahm dont la petite renommée s'est faite à travers des univers très sombres dans sa trilogie gothique à la Fox ( The Undying Monster, Jack l'éventreur et Hangover Square en 1942, 44 et 45) et le film noir psychanalytique Le Médaillon (1946) surprend avec cette fresque religieuse naïve. Le film transpose les vrais évènements de 1917 ayant trait à Notre-Dame de Fátima, soit l'apparition de la Vierge Marie dans un village du Portugal à trois enfants. La construction est clairement inspirée du chef d'œuvre de Henry King Le Chant de Bernadette (1947) qui évoquait le destin de Bernadette Soubirous incarnée par Jennifer Jones.
Grande différence cependant, Henry King tout en adoptant une vraie tonalité religieuse exaltée laissait à la libre interprétation du spectateur les visions de Bernadette. On croyait à la conviction et la foi de Bernadette mais sans se sentir contraint d'y adhérer ce qui donnait une ampleur et une richesse thématique accrue au film. On ne trouve guère ce genre de subtilité ici où le prosélytisme est appuyé sans ambiguïté ce qui risque de faire fuir tous les allergiques les plus acharnés à la chose religieuse. Le jeu subtil de Jennifer Jones était également plus émouvant et subtil sous l'exaltation alors que les trois jeunes héros de The Miracle of Our Lady of Fatima peuvent être aussi touchant qu'agaçant dans leur candeur et innocence immaculée. Le film ne manque pourtant pas d'intérêt sous ses écueils.
Le scénario situe parfaitement la situation du Portugal d'alors et la façon dont le miracle s'y inscrit. En 1910, Manuel II doit quitter le pays, et une république libérale et laïque est proclamée, rejetant et stigmatisant la pratique religieuse notamment par le fichage des prêtres. Sept ans plus tard l'étau s'est légèrement desserrée, le culte étant autorisé bien qu'étroitement surveillé par les administrateurs d'état. C'est dans ce contexte que trois jeunes berger du petit village de Fatima, Lucia, Jacinta et Francisco, voient leur apparaître dans le vallon où ils font paître leur bêtes la Vierge Marie (qui ne se présente pas sous son nom) qui leurs annonce qu'elle leur apparaitra à la même date lors des six prochains mois.
Dans ce pays oppressé et dont les hommes sont partis à la guerre, la nouvelle se propage et est un motif d'espoir qui va attirer une population pieuse des quatre coins du Portugal pour assister au miracle. Ce mouvement dérange autant le gouvernement qui va alors menacer les enfants et leur famille ainsi que l'église elle-même voyant les fidèles quitter le culte installé pour s'agglutiner sur le vallon.
On retrouve ainsi les thématiques du Chant de Bernadette (la finesse en moins) où le l'église est plus une institution à suivre qu'un lieu où exprimer sa foi et incapable d'admettre ou se questionner face à un possible vrai miracle. C'est malheureusement traité fort grossièrement et les agents d'état sont bien trop manichéen dans leur malveillance pour amener une profondeur à leurs agissements. En restant constamment du point de vue des enfants, le film adopte plutôt une tonalité de conte en simplifiant à l'extrême tout ce qui les entoure et faisant des apparitions les seuls moments de paix des jeunes héros.
Malgré niaiserie et la guimauve qui n'est jamais très loin (les trois ayant la larme un peu trop facile) l'émotion parvient néanmoins à fonctionner grâce notamment une jeune Susan Whitney très habitée en Lucia. Le film fait preuve d'un étonnant recul aussi pour dénoncer la ferveur aveugle et quelques peu brutale des suiveurs s'agrippant aux enfants devenus des reliques religieuses bien malgré eux. Cette ferveur peut pourtant être un moteur de rébellion lorsqu'ils se masseront aux portes de la prison où sont retenus les enfants.
La vraie force du film reste cependant la mise en scène puissante de John Brahm qui fait passer pas mal d'écarts. Ce Portugal rural est totalement factice, entre paysage californien ou de studio et inspire pas mal le réalisateur dans des cadres et compositions de plans baignant dans l'iconographie religieuse. Les ciels aux couleurs changeantes, les plans d'ensemble des foules captivées ou encore les apparitions divines offrent de superbes moments portés par un magnifique score de Max Steiner.
L'usage des couleurs est aussi assez surprenant avec ses accents saturés inondant l'image notamment les accents rougeoyants de certaines séquences notamment lorsque Lucia est en plein doute. Cela culmine avec le grand final et la manifestation du miracle le temps d'une scène quasi psychédélique où le soleil brille de mille feux et semble s'abattre sur terre, un sacré moment si on ose dire. On aurait pu être convaincu malgré les grands écarts de ton (le côté pieux étant difficile à éviter sur un tel sujet) si un message plus douteux ne se dissimulait pas sous l'ensemble et qui gâche un peu l'impression.
Les tyrans au pouvoir et empêchant l'essor religieux sont associés au communisme et le secret de la Vierge révélé aux enfants (jamais dévoilé par eux en réalité) concerne les catastrophes à venir sur le monde dont la Révolution Russe, pays où il faut instaurer la foi. Douteux et pas très fin alors que malgré les défauts le spectacle n'était pas inintéressant.
Sorti en dvd zone 1 chez Warner et doté de sous-titres français
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